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L’investissement socialement responsable (ISR) est devenu un enjeu majeur pour les autorités régulatrices, l’industrie financière, les agences de notation et les investisseurs.
La littérature sur les impacts financiers de l’ISR se concentre sur la dichotomie entre les fonds d’investissement conventionnels et les fonds libellés en ISR. Les premières études de Hamilton et al. (1993), Goldreyer et Diltz (1999) et Statman (2000) comparent les rendements ajustés au risque des indices ISR et des fonds aux États-Unis pour les années 1990 et montrent que les impacts de l’investissement éthique ne sont pas significativement différents de zéro. Luther et Matatko (1992, 1994) et Mallin et al. (1995) trouvent les mêmes résultats concernant les fonds britanniques pour les périodes 1984-1990 et 1986-1994 respectivement. En plus de trouver des résultats similaires, ces auteurs montrent qu’un processus de sélection relevant d’une éthique pourrait introduire un biais lié à la taille des entreprises sélectionnées. De cette conclusion, Goldreyer et al. (1999) passent du cadre rendement-risque au modèle CAPM de Sharpe (1964) et Lintner (1965), comme Kreander et al. (2005) et Renneboog et al. (2008a; 2008b). Ils utilisent le modèle à trois facteurs de Fama et French (1992; 1993) pour évaluer les performances de fonds en Europe et aux États-Unis. Leurs résultats aboutissent aux mêmes conclusions : la performance financière tend à être inférieure lorsque l’investissement est éthique, mais leurs résultats sont à peine significatifs. L’introduction du modèle à quatre facteurs de Carhart (1997) par Bauer et al. (2005), qui étudient les la performance des fonds communs de placement ISR américains, britanniques et allemands, ne contredit pas l’importance des différences de performance observées dans les études précédentes. Statman et Glushkov (2009) et Hong et Kacperczyk (2009) ont choisi de considérer les “sin stocks” dans le portefeuille d’investissement. Une performance excédentaire positive et significative de ces fonds soutiendrait l’idée, par symétrie, que l’éthique a un coût.
Ces résultats apparemment différents obtenus dans la littérature empirique mettent en évidence un problème méthodologique concernant l’approche duale de l’investissement conventionnel par rapport à l’investissement éthique. Par conséquent, la littérature empirique la plus récente se concentre sur le manque de méthodologie stricte pour la comparaison des performances. En effet, les premières études sur l’impact de l’éthique (Hamilton et al., 1993; Bauer et al., 2005) sont basées sur une comparaison directe entre fonds conventionnels et ISR, mais n’évaluent pas la pertinence d’une comparaison entre ces fonds communs de placement.
Depuis lors, cette méthodologie a été enrichie suite à deux innovations majeures. D’une part Statman (2000, 2006) et Schroder (2007) utilisent des indices financiers plutôt que des fonds pour comparer les performances financières des benchmarks éthiques et conventionnels. D’autre part, une procédure d’appariement préalable entre fonds conventionnels et éthiques (Mallin et al., 1995; Gregory et al., 1997; Kreander et al., 2005) et même concernant les “sin stocks” (Hong et Kacperczyk, 2009; Humphrey et Tan, 2013; Borgers et al., 2015) les fonds communs de placement sont introduits pour améliorer la pertinence des comparaisons quantitatives de performance.
Dans les articles de recherche les plus récents, l’utilisation de scores croisés basés sur des critères ESG parmi les données sur les actifs permettent d’éviter les biais statistiques inhérents à la dualité des fonds communs de placement. El Ghoul et Karoui (2017) établissent un score RSE pondéré par l’actif pour les fonds communs de placement à partir de leurs expositions en utilisant des données au niveau de l’entreprise à partir de MSCI ESG KLD STATS. Ce traitement préliminaire des données leur permet de comparer les performances des fonds communs de placement américains sur la même base pour la période 2003 – 2011. Borgers et al. (2015) utilisent la même approche avec les fonds communs de placement américains les avoirs de 2004 à 2012 pour mesurer l’impact des facteurs sociaux sur la performance financière.
Le succès de la finance responsable garde néanmoins une part d’ombre. Nous essaierons dans un premier temps de déterminer ce qu’est vraiment un produit financier “éthique” ? Cette analyse pourra ensuite amener à mettre en place un cadre pour une notation éthique indépendante. Nous analyserons si les convictions concernant le coût d’une exigence morale sur les performances financières d’un investissement sont en tout cas à revoir. Pour ce faire, nous emprunterons une approche plus théorique pour analyser les fondements microéconomiques de l’éthique et en particulier la fonction d’utilité de l’investisseur éthique étendant les résultats de Bollen (2007).
Activity report 2022 (FR)
Activity report 2023 (ENG)