+ Ajouter à ma sélection « La spéculation est notamment due à l’anticipation des erreurs humaines» 27 Mar. 2014 Actualités Sophie Moinas et Sébastien Pouget, membres de l’école de l’économie de Toulouse (TSE), ont reçu le prix de l’Institut Europlace de Finance (EIF) du meilleur article financier pour leur papier « The bubble game : an experimental analysis of speculation ». Sponsorisé par Groupama AM, ce prix a été remis dans le cadre de la 7eme édition du Financial Risks International Forum, organisé par l’Institut Louis Bachelier. Vos recherches portent sur la spéculation. Pouvez-vous en donner une définition ? Spéculer consiste à acheter un actif avec l’intention de le revendre à un prix supérieur, sans forcément s’attendre à en recevoir un quelconque revenu, comme un dividende. En ce sens, un investisseur qui spécule pourra parfaitement acheter un titre à un prix supérieur à sa valeur fondamentale tout simplement parce qu’il s’attend à pouvoir le revendre à un prix encore plus grand… La spéculation peut donc entraîner des bulles dans les prix des actifs financiers, c’est-à-dire des situations où les prix grimpent sans que cette hausse ne soit reliée à une augmentation des revenus futurs offerts par les actifs. La spéculation est aussi au cœur de la formation des chaînes de Ponzi telle que celle découverte lors du scandale Madoff. Les bulles spéculatives sont souvent identifiées a posteriori, rarement dans l’instant… Dans la réalité, il est souvent difficile de déterminer la valeur fondamentale et donc de savoir si nous sommes en présence de bulle. Dans le cas de la bulle Internet par exemple, il s’agissait d’une nouvelle économie. Les valorisations des start-up ne pouvaient pas être comparées avec des valeurs passées. Il était donc difficile d’affirmer avec certitude que ces actifs faisaient l’objet de spéculation. Dans le cadre de vos travaux, vous avez développé un jeu en laboratoire : le « bubble game ». En quoi consiste-t-il ? L’objectif est d’étudier la formation des bulles. Pour cela, nous proposons un jeu très simple. Les participants, en nombre fini, sont invités à acheter l’un après l’autre un actif dont la valeur fondamentale est nulle. Tout le monde possède cette information. Dans ces conditions, nous pourrions croire qu’il n’y aurait pas d’échange. En effet, le dernier joueur devrait refuser d’acheter car il ne pourra pas revendre son titre. Sachant cela, le précédent joueur devrait également refuser et ainsi de suite. Or, en réalité, on observe dans nos expériences en laboratoire de nombreux cas de spéculation et de nombreux échanges. Comment l’expliquez-vous ? La spéculation est notamment due à l’anticipation des erreurs humaines. Certains joueurs prévoient le fait que d’autres participants vont acheter alors qu’ils ne devraient pas. Spéculer devient alors profitable et donc rationnel. De plus, même une très faible possibilité d’erreur peut entraîner de nombreux comportements spéculatifs car un investisseur en spéculant pourra gagner s’il revend à un autre investisseur qui fait une erreur ou bien à un investisseur qui lui même espère trouver un autre investisseur qui fait une erreur ou qui spécule et ainsi de suite… Selon vous, quelles mesures pourraient contribuer à réduire la spéculation ? Toutes les dispositions contribuant à accroître la transparence et la qualité des informations, en particulier sur la valeur fondamentale des actifs, sont positives. Une meilleure formation des acteurs financiers peut également réduire les erreurs, et ainsi les bulles spéculatives. Propos recueillis par Coralie Bach Sur le même thème « Il faut encourager les synergies entre les différentes disciplines académiques » Mathieu Rosenbaum, Professeur UPMC et Professeur chargé de cours à Polytechnique, a reçu le prix EIF du meilleur jeune chercheur. «Les problématiques post-transactions sont devenues centrales» Christophe Pérignon, professeur en finance à HEC, a reçu le prix EIF du meilleur jeune chercheur. Comment mieux comprendre le pricing des options Pierre Henry Labordère, chercheur au département de recherche quantitative de la Société Générale et chercheur associé au CMAP Ecole Polytechnique, a reçu le prix EIF de l’article d’actualité.